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La fête de Hanouka

A l’approche du solstice d’hiver, les jours sont de plus en plus courts, et les nuits de plus en plus longues et l’on finit par se demander si la lumière perdue reviendra un jour. L’effet psychologique du solstice d’hiver est universel : dans toutes les grandes traditions du monde, à ce moment le plus sombre de l’année, on fête les lumières. Dans l’Antiquité, les païens célébraient le solstice d’hiver par des fêtes débridées. Les Perses allumaient d’immenses feux de joie tandis que leur roi lâchait des oiseaux. On sait que la date de Noël était jadis également une grande fête chez les païens. Quant aux Juifs, ils célèbrent Hanouka, une des fêtes les plus populaires du calendrier religieux, et qui tombe d’ailleurs fréquemment en même temps que Noël.

De la lumière pour la nuit la plus noire

Dans le calendrier juif, les huit jours de Hanouka commencent le soir du 25 Kislev (une date qui tombe en décembre, cette année le 6 décembre 2015). Les mois du calendrier juif sont basés sur le cycle lunaire, si bien que le 25 du mois tombe toujours quatre jours avant la nouvelle lune, c’est-à-dire la nuit la plus sombre du mois.

Plus important, du fait que Kislev est toujours proche du solstice d’hiver, Hanouka englobe toujours la nuit la plus noire (le solstice est la nuit la plus longue de l’année, mais il peut coïncider avec une pleine lune).

Liberté, liberté chérie

La fête de Hanouka commémore deux événements. Le premier est politique : au second siècle avant l’ère chrétienne, des résistants juifs vainquirent le roi Antiochus qui avait tenté de faire disparaître le judaïsme. Hanouka se trouve être ainsi la première guerre de religion de l’histoire. Le second est d’ordre religieux : il célèbre le miracle d’une mèche qui a brûlé pendant huit jours avec une quantité d’huile juste suffisante pour un seul jour.

Hanouka signifie « inauguration ». La victoire militaire s’acheva en effet par la ré-inauguration du Temple de Jérusalem souillé par le paganisme, et à nouveau dédié au culte du Dieu unique après une longue épopée faite de persécutions et de guerres.

Les deux livres des Macchabées

L’histoire de Hanouka est racontée dans les deux livres des Macchabées, qui ont été écrits vers le Ier siècle avant l’ère chrétienne, environ un siècle après les événements. En l’an 325 avant l’ère chrétienne, l’empire d’Alexandre le Grand s’étendait sur tout le Proche-Orient actuel. À sa mort, son empire fut démembré. La Palestine tomba dans le giron de la dynastie des Séleucides.

Au second siècle avant l’ère chrétienne, le roi Antiochus IV, surnommé Épiphane (divin), décida d’unifier son royaume et de supprimer les religions locales. Il interdit la pratique du judaïsme. Il imposa le culte des idoles, jusque dans le Temple de Jérusalem. Très attirés par la civilisation grecque, bien des Juifs se soumirent sans rechigner à la nouvelle législation. D’autres choisirent le martyre plutôt que de tomber dans l’idolâtrie. C’est alors qu’un prêtre, Mattathias, de la famille des Asmonéens, sonna le tocsin de la révolte. Il exécuta un Juif en train d’apporter un sacrifice aux idoles et prit le maquis dans les montagnes de Judée.

Mattathias réussit à rassembler une armée de croyants et déclara la guerre aux troupes d’Antiochus : elle dura trois ans (de 169 à 166 avant l’ère chrétienne). Après sa mort, son fils Judah prit la tête des résistants. Il était si vaillant qu’il fut surnommé Macchabée, «marteau», un peu comme plus tard Charles Martel. Dorénavant, on allait appeler les membres de cette famille tantôt les Maccabées, tantôt les Asmonéens, cette dernière dénomination étant plus légitime. Judah avait quatre frères : l’un d’entre eux périt durant

la guerre, à l’issue de laquelle en l’an 164 avant l’ère chrétienne, les Juifs reprirent Jérusalem, chassèrent les troupes gréco-syriennes et restaurèrent les parties profanées du Temple. Tous ces événements sont relatés dans le Livre dit des Maccabées et furent confirmés par l’historien Flavius Josèphe.

Le miracle de ta lampe

C’est au moment de la nouvelle inauguration du Temple que se produisit, selon la tradition, le miracle qui a donné sa dimension religieuse à la victoire militaire. Les païens avaient consacré le Temple à Zeus et profané toutes les huiles sacrées qui servaient à alimenter le grand chandelier d’or à sept branches du Temple. Par miracle, on retrouva une petite fiole d’huile intacte. Second miracle : dans cette fiole, il n’y avait d’huile que pour un jour, et le chandelier resta allumé huit jours durant. C’est alors qu’il fut décidé d’instituer une fête où l’on devait allumer des lumières pendant huit jours. C’est l’origine de Hanouka. !a fête des lumières.

Ainsi naquit également un nouveau royaume juif qui allait durer près de deux siècles. À la mort de Judah Maccabée, ses deux derniers frères, Simon et Jonathan, finirent par reconquérir toute la Judée. Simon fut proclamé grand prêtre, ce qui était naturel, mais aussi prince d’Israël, ce qui était contraire à la loi juive qui interdisait de réunir le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. Il fonda une nouvelle dynastie : les Asmonéens et s’allia aux Romains. Les conséquences de cette alliance allaient se révéler funestes, d’autant plus que les Asmonéens n’hésitèrent pas à convertir de force plusieurs populations. Ils persécutèrent aussi les Pharisiens.

C’est sans doute la raison pour laquelle cette dynastie ne fut pas en odeur de sainteté auprès des rabbins. Dans le Talmud, ils occultèrent la victoire militaire au profit du miracle de la fiole juive.

Ce miracle a une très forte charge symbolique. Comment mieux représenter l’incroyable survie d’un peuple ballotté dans l’histoire que par l’image d’une flamme destinée à s’éteindre et qui survit au-delà de toutes les probabilités? Aussi bien, la fête de Hanouka prit-elle, tout au long de l’histoire, un caractère symbolique. Comme le dit la liturgie de Hanouka, «ce fut la victoire des faibles sur les forts, des peu nombreux sur les nombreux, des purs sur les impurs». Autrement dit, un triomphe miraculeux.

Au xxe siècle, les avatars de l’histoire juive remirent cependant au premier plan l’héroïsme des Asmonéens. D’une part, il inspira les combattants du ghetto de Varsovie ; de l’autre, il servit d’exemple aux sionistes luttant contre l’Empire britannique et continue d’être considéré comme un des prodromes de l’indépendance d’Israël.

Pour commémorer le miracle de la fiole juive qui brûla huit jours, on doit allumer dans son foyer des lumières pendant la même durée. Ce rite est exécuté à l’aide d’un chandelier particulier, appelé hanoucciah : à la différence du chandelier du Temple, la menorah, constituée de sept branches, il en comporte huit. En fait, il en comporte même neuf, la neuvième, intitulée le shammash, servant à allumer les autres.

D’après le Talmud (voir chapitre 3), deux célèbres rabbins du ier siècle ont enseigné chacun une méthode différente pour allumer les bougies. Selon Hillel, il faut allumer une bougie le premier soir, deux le deuxième soir, etc. et pour finir huit bougies le huitième soir. C’est la pratique courante, mais un autre sage, Shammaï, préconisait d’allumer les huit bougies le premier soir, sept le second et ainsi de suite.

Cette controverse exprime deux idées différentes. Pour Hillel, c’est celle du progrès : il faut qu’il y ait dans le monde de plus en plus de lumière. Pour Shammaï, il faut tenir compte du nombre de jours qui restent : c’est-à-dire, du temps qu’il faudra pour atteindre la plénitude…

L’allumage des bougies s’accompagne traditionnellement d’une série de prières. Souvent, on ouvre les cadeaux – qui sont traditionnels – après l’allumage des bougies et la bénédiction. Puis on mange des mets qui sont particuliers à cette fête et l’on joue à des jeux typiques de Hanouka. Par ailleurs, plusieurs règles doivent être respectées pour l’allumage des bougies :

La première bougie doit être positionnée tout à fait à droite, et chaque soir, on doit ajouter une bougie immédiatement à gauche de la précédente. Cependant, il faut allumer d’abord la dernière bougie (celle du jour), puis continuer de gauche à droite jusqu’à ce que toutes les bougies soient allumées (le dernier jour, huit bougies brûleront). Certains reviennent à l’ancienne tradition des lampes à huile.

Les bénédictions du moment

Les trois bénédictions récitées sur l’allumage de la Hanouka sont les suivantes :

Barouh’ atah Adonaï, Elohenou Meleh’ ha-olam, asher kideshanou bemitzvotav vetzivanou lehadlik ner shel H’anouccah.

«Béni sois-Tu, Éternel notre Dieu, Roi de l’univers, qui nous a sanctifiés par tes commandements et nous a ordonné d’allumer les lumières de Hanouka.

Barouh’ atah Adonaï, Elohenou Meleh’ ha-olam, sheh-assah nissim leavoteynou ba-yamim ha-haym baz’man hazeh.

«Béni sois-Tu, Éternel notre Dieu, Roi de l’univers, qui as accompli des miracles pour nos ancêtres autrefois et aujourd’hui. »

Le premier soir de H’anouccah, on ajoute la bénédiction suivante :

Barouh’ atah Adonaï, Elohenou Meleh’ ha-olam, sheh’éyanou vekyemanou vehigianou lazeman hazé.

«Béni sois-Tu, Éternel notre Dieu, Roi de l’univers, qui nous a gardés en vie et nous a permis d’assister à ce moment. »