En politique locale et nationale, un des membres éminents de notre communauté se fit un nom ; il s’appelait Alexandre Israël et l’une des places de la ville de Troyes porte aujourd’hui son nom. Même pendant la guerre, les autorités hitlériennes, les collaborateurs, les représentants de Vichy ne cherchèrent pas à débaptiser cette place. A.Israël était le journaliste le plus sage et le plus soucieux de sa fonction, le parlementaire le plus laborieux et le plus jaloux de son indépendance.
Il était le conseiller le plus éclairé et le plus écouté des grands hommes d’état de l’époque et en même temps le plus discret et le plus désintéressé.
Né à Alger le 25 novembre 1868, il vint dès son jeune âge à Reims où sa famille s’était fixée, étudia au lycée de cette ville et retourna dans sa ville natale pour y faire son droit.
Au cours de son service militaire dans la marine, à Cherbourg, il collabora, sous le nom d’A.Résil, au journal « La Justice » de Clemenceau. A vingt ans, il entra comme rédacteur à « L’éclaireur de l’Est », qui venait d’être fondé à Reims, en pleine bataille boulangiste.
A vingt-cinq ans, en 1893, il fut nommé rédacteur en chef à « L’éclaireur de l’Est» où il ne resta que jusqu’en 1900 car l’un des nouveaux directeurs étant anti-dreyfusard. Il devint, par la suite, secrétaire de
Gaston Arbouin, député de l’Aube, en même temps qu’il entrait à l’agence Fournier où on le chargea du service des informations politiques.
A la mort de Gaston Arbouin, il devint rédacteur en chef du « Petit Troyen», collabora à «La Lanterne» de 1911 à 1918 et dirigea le journal « L’événement ».
Devenu parlementaire, il assura la direction politique de l’agence Fournier. En 1919, il fut élu député de l’Aube avec le « Bloc National » ; candidat du Cartel des Gauches, en 1924, il fut battu. Peu de jours après, il était appelé par le nouveau Président du Conseil, Edouard Herriot qui le nommait à la tête de son cabinet. Sa fidèle collaboration continua sous E.Herriot, mais le 19 avril 1925, le Ministère fut renversé, quand il fut nommé Président de la Chambre des Députés puis quand il devint Ministre de l’Instruction Publique.
Le 7 janvier 1927, il se présentait comme sénateur dans le département de l’Aube mais ne fut pas élu ; il le fut plus tard, le 25 septembre 1927. Il siégea assidûment dix ans au Sénat, y mettant, selon les propos du
Président du Sénat, M.Jeanneney, toute sa ferveur à l’égard des institutions républicaines, ainsi qu’en ses principes laïques et démocratiques.
En 1938, le Président Herriot constituant son ministère, lui demanda de choisir un portefeuille ; mais il refusa, comme il l’avait fait à plusieurs reprises. En juin 1932, il acceptait un poste au sous-secrétariat d’état au Ministère de l’Intérieur, auprès de Paul Boncour. En novembre 1933, il prit le portefeuille de la Santé Publique, dans le cabinet Chautemps. En plus de son travail de journaliste, de parlementaire, de ministre, il écrivit des ouvrages sur plusieurs sujets politiques : l’école de la république, la dissolution, la réforme de l’état face aux partis, la liberté de presse d’hier et de demain…
En juin 1936, le président Camille Chautemps lui offrait un portefeuille, mais son état de santé le lui fit refuser. Il décéda en 1937, après une longue maladie ; on ramena sa dépouille à Troyes où un catafalque fut dressé au journal le « Petit Troyen ». Toute la ville et tout le département de l’Aube, suivirent son cercueil, jusqu’au cimetière de Troyes où il voulait être inhumé. Beaucoup d’amis suivirent son enterrement, ainsi que des députés, sénateurs, ministres et présidents du conseil.
De nombreux discours furent prononcés, en particulier par le Président Herriot qui, quelques mois plus tard, inaugura à Troyes, avec le ministre du Commerce M. Gentin, en juillet 1938, la place Alexandre Israël.